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Sous le sapin de la BnF: Maternité, une histoire en images

Christine de Pisan enseignant à son fils. Livre du chemin de longue estude (v. 1400-1410). BnF, MSS, fr. 836.
Christine de Pisan enseignant à son fils. Livre du chemin de longue estude (v. 1400-1410). BnF, MSS, fr. 836.

 

Pour les fêtes, le département Philosophie, Histoire, Sciences de l’Homme de la BnF vous présente ses récentes publications. Premier volet : une histoire des images de la maternité, rédigée par Laurence Jung, cheffe du service Sciences sociales (depuis devenue directrice-adjointe du département Découverte des collections et accompagnement à la recherche).

Chez les mammifères, la maternité est un fait naturel, inhérent à la perpétuation de l’espèce et par là pour ainsi dire universel : chaque être naît d’une mère qui l’a porté en son sein. Mais chez les humains, ce fait naturel est aussi un fait historique et social, abondamment représenté, investi et décrit. Images et textes, mythes et représentations brossent un portrait de ce que les différentes sociétés ont associé au fait maternel, à travers l’espace et le temps. Voilà le projet de cet ouvrage : donner à voir, par les images, une histoire des différentes conceptions et représentations de la maternité, dans toute leur complexité, et notamment à l’heure où les révolutions scientifiques et sociales redéfinissent le rapport traditionnel entre maternité, biologie et société.

Gautier Dagoty père, Anatomie des parties de la génération de l'homme et de la femme, Paris, Brunet, 1773. BnF, ARS, Fol-S-1009 (1)
Gautier Dagoty père, Anatomie des parties de la génération de l’homme et de la femme, Paris, Brunet, 1773. BnF, ARS, Fol-S-1009 (1).

L’ouvrage s’appuie pour cela sur les collections des différents départements de la Bibliothèque nationale de France : vases antiques, monnaies, médailles, manuscrits orientaux et occidentaux, estampes, photographies… La Bibliothèque garde la trace de l’esprit du temps, que ce soit dans des documents du quotidien ou des œuvres d’artistes célèbres tels que Dürer, Rembrandt, Mary Cassatt, Niki de Saint Phalle ou Louise Bourgeois.

Il s’ouvre sur les images les plus anciennes : déesses mères de la préhistoire et de l’Antiquité, comme Cybèle ou Isis, et leurs rites de fécondité liant la fertilité des femmes et celle de la terre, mais aussi des aspects plus historiques. Sont ainsi questionnées la place des femmes et des mères dans les sociétés grecques antiques, et les connaissances scientifiques d’alors sur la grossesse et l’accouchement. Avec les Romains, c’est ensuite sur l’émergence de la figure du Pater familias et la pratique de l’adoption que se braque le projecteur.

Isis allaitant Horus. Date indéterminée. Statuette en bronze. Hauteur : 28 cm. BnF, MMA, inv. 53.243.
Isis allaitant Horus. Date indéterminée. Statuette en bronze. Hauteur : 28 cm. BnF, MMA, inv. 53.243.

La place des mères dans la Bible, Ancien et Nouveau Testament, est l’objet des développements suivants, car si Dieu est toujours décrit comme masculin (le Père, le Fils), les figures de mères abondent dans l’Écriture : Ève, Sarah, Marie, etc. Leur rôle est ambigu. D’Ève, mère de l’humanité, provient la tentation, le péché et la malédiction de l’enfantement. De Marie, mère de Dieu, vient au contraire la libération de la mort et la salvation universelle.

Avec le triomphe du christianisme et l’avènement du Moyen Âge, de nouvelles images s’imposent. Le culte de la Vierge et de sa maternité divine écrase les représentations maternelles et devient une source de métaphores et de pratiques nombreuses : la mère Église, la rhétorique du lait nourrissant les chrétiens de la grâce de Dieu, etc. Mais pourtant, le Moyen Âge promeut aussi les images de saintes chastes refusant la chair et la maternité. Au fil des siècles, les images de la Vierge se font plus naturalistes et plus émotives : la tendresse de la Vierge à l’Enfant, la douleur de la Vierge au tombeau dessinent une mère qui se soucie de son divin fils, l’aime et le pleure.

Martin Schongauer, Vierge à l'Enfant sur un banc de gazon, fin du XVe s. BnF, EST, Rés. EA-47 (2)-Boîte écu
Martin Schongauer, Vierge à l’Enfant sur un banc de gazon, fin du XVe s. BnF, EST, Rés. EA-47 (2)-Boîte écu

L’époque moderne voit une rupture partielle avec ce modèle. Le protestantisme, puis des formes plus austères de catholicisme comme le jansénisme, rompent avec le culte d’une Vierge trop charnelle et trop maternelle. L’avènement d’une morale plus rigoriste en terres catholiques comme protestants resserre par ailleurs le carcan juridique et social autour des mères, sommées de ne pas montrer leur grossesse en société, mais en même temps suspectées de la dissimuler pour commettre l’infanticide dans certaines législations. Pour autant, les évolutions scientifiques comme la communication monarchique remettent la maternité au centre d’une série de préoccupations : réflexions sur les mécanismes de la grossesse et de l’enfantement, mais aussi mise en avant du couple reine-mère et prince dans les familles royales des XVIIe et XVIIIe siècle.

Médaille d'Anne d'Autriche et Louis XIV, 1643. BnF, MMA, Série Royale 500.
Médaille du couple mère-fils composé par Anne d’Autriche et Louis XIV, 1643. BnF, MMA, Série Royale 500.

Avec l’époque contemporaine, la maternité devient un objet de discours (voire de débats) nombreux et multiples. Débats sur la démographie – entre approches malthusienne et politique natalistes, voire eugénistes – mais aussi débats sur la place des mères dans l’éducation des enfants et la concurrence possible entre instruction maternelle et instruction publique d’une part, et entre le rôle de mère au foyer et celui de femme active d’autre part. Débats qui font peser sur les mères une lourde charge vis-à-vis du reste de la société et qui justifient, dans les régimes autoritaires, la mise sous tutelle des femmes. Et puis il y a la révolution scientifique, qui va dans un premier temps réduire drastiquement les risques de l’enfantement (mort en couches, douleur, etc.), puis peu à peu déconnecter la féminité de la maternité et la sexualité de la procréation – participant à la révolution sociétale qui a profondément remis en cause les conceptions traditionnelles de la famille en Occident.

« La France a besoin d’enfants … ». Affiche pour la journée nationale des mères de familles nombreuses, 1918. BnF, EST, QB-1 (1918)-FT6.
« La France a besoin d’enfants… ». Affiche pour la journée nationale des mères de familles nombreuses, 1918. BnF, EST, QB-1 (1918)-FT6.

Le texte est préfacé par Nancy Huston, célèbre auteuresse et femme de lettres, qui a elle-même fait de la maternité un thèmes récurrents de son écriture, que ce soit dans romans (Lignes de faille, L’Empreinte de l’ange, etc.) ou ses essais (Journal de la Création…).

Pour en savoir plus

Laurence JUNG, Maternité, une histoire en images, Paris, BnF, 2024. Préface de Nancy HUSTON.

39 €. 256 pages, 150 illustrations, 17 x 24 cm.

ISBN/EAN : 978-2-7177-2974-0 / 9782717729740

Plus de détails sur le site des Éditions de la BnF.

Blog Histoire

Le carnet L'Histoire à la BnF est administré par le service Histoire de la Bibliothèque nationale de France.

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OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Blog Histoire (5 décembre 2024). Sous le sapin de la BnF: Maternité, une histoire en images. L'Histoire à la BnF. Consulté le 15 juin 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/12zmy


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